Le Design Thinking : une pédagogie innovante à finalité opérationnelle

C’est l’alliance de l’ingénieur et de l’artiste pour la conception de produits créateurs de nouveaux usages, tel le smartphone. Née au milieu des années 2000 dans la silicon valley au sein de l’agence de créativité IDEO grâce au travail combiné de David Kelley ingénieur et de son complice le désigner Tim Brown, cette nouvelle méthode suppose de faire réfléchir et produire ensemble des spécialistes de disciplines différentes. Coopèrent ainsi des ingénieurs pour l’approche scientifique ou informatique, des sociologues et anthropologues pour les usages et pratiques sociales, des designers qui vont tout mettre en œuvre pour que le nouveau produit, d’une réelle utilité, soit d’un usage simple, efficace, sous une forme agréable à regarder et à toucher, des professionnels du marketing pour son positionnement et sa promotion et des économistes pour en maitriser les coûts de production et en fixer le prix.

Cette méthode de travail transdisciplinaire à finalité opérationnelle est développée sur le plan pédagogique à l’université de Stanford à la « d.school » et commence à irriguer les écoles d’ingénieurs et de commerce en France. A la rentrée s’ouvrira à Marne la Vallée « la Paris-Est d.school ».

Née de l’initiative de l’Agence nationale pour la recherche qui reconnait cette démarche comme une formation innovante, elle est financée par des fonds levés dans le cadre des investissements d’avenir par le Grand Emprunt. Madame Véronique Hillen, directrice du département Génie industriel à l’Ecole des Ponts, la dirigera.

La pédagogie porte, à côté de l’apprentissage des disciplines fondamentales, sur du travail collaboratif et la solution de problèmes concrets et réels d’entreprises. Les sujets sont très variés et peuvent, selon l’article du Monde du 10 juillet dernier évoquant cette question, aller de la mise en place d’une salle de bains pour séniors à la création d’un réfrigérateur compact , d’une fontaine à eau ou d’un aéroport du futur.

Madame Hillen explique que « la consigne est de passer très vite à des prototypes en carton, plastique ou mousse, dans un atelier de bricolage qu’ils doivent pouvoir atteindre en moins de sept secondes (la « seven second shop ») depuis leur salle de travail, elle-même conçue comme un lieu convivial, une pièce à vivre. Car il est très important de passer immédiatement à l’action, de ne pas en rester à l’idée vague, un défaut bien français ». La deuxième année les étudiants partagent leur temps entre Stanford et Paris par groupes de quatre qui se rencontrent trois fois dans l’année pour résoudre des problèmes.

Madame Hillen assure que « lorsque les étudiants sont suffisamment sous tension et ne pensent qu’à résoudre leur problème, alors tout les inspire : prendre le train, manger,… et je sais que c’est gagné. C’est en ne cherchant pas à tout prix les résultats que l’on trouve ». Toujours selon Madame Hillen, près de la moitié des projets aboutissent à un objet en production. A titre d’exemple, elle présente un vélo développé pour les pays à faible niveau de ressources, qui permet d’aller chercher de l’eau et de la filtrer durant le trajet de retour.

Cette pédagogie a une double vertu :
Elle montre à l’évidence que favoriser la transversalité des disciplines est source d’enrichissement personnel et de créativité collective.
Elle développe chez celui qui la pratique une réelle capacité à l’innovation.
Elle illustre au mieux la maxime qui veut que le savoir est la seule richesse qui s’enrichit quand on le partage.

On comprend mieux pourquoi beaucoup d’écoles se positionnent maintenant sur ce créneau et nouent des alliances transdisciplinaires