3 facteurs pour un enjeu stratégique

Fri Dec 04 2009 11:40:18 GMT+0100 (Romance Standard Time), Jean Wemaëre

Le secteur nucléaire et le secteur de la formation ont partie liée. Une telle affirmation peut sembler étrange, voire incongrue, elle repose, cependant, sur des observations et une analyse fort sérieuses. L’examen du développement du secteur nucléaire met, en effet, au jour des évolutions très fortes, lourdes de conséquences.
Le secteur nucléaire est entrain de connaître un développement sans précédent ; Il se construira dans les vingt prochaines années autant de centrales que pendant tout le XXème siècle. Tous les pays sont concernés la France, bien sur, mais aussi la Grande-Bretagne, la Russie, le Japon, l’Afrique du Sud, les Etats-Unis, le Brésil et la Chine qui, à elle seule, envisage d’en installer 38 !
Un tel développement est du à trois facteurs principaux :

  1. La demande d’électricité explose, notamment avec la montée en puissance des économies chinoises, indiennes et brésiliennes.
  2. Les ressources en pétrole s’amenuisent d’année en année alors que les besoins en énergie croissent dans le monde entier ; conséquence : les prix du pétrole augmentent et continueront à augmenter.
  3. La lutte pour réduire les échappements de CO2 et limiter l’effet de serre contraint l’ensemble des pays à trouver rapidement des énergies de remplacement.
    Ces trois facteurs, concourent au fait que la course au nucléaire civil a véritablement commencé. Ce n’est pas sans risque mais il s’agit d’une course vers une énergie propre, conservatrice, à certains égards, de notre environnement. D’une façon plus générale, la recherche et l’action sur les noyaux atomiques et cellulaires ne cessera plus et marquera au vingt et unième siècle tous les secteurs de la science et de la technologie. Aussi, est-on en droit de penser que ces multiples recherches et actions impactent, dans son ensemble, l’économie du savoir.
    Or l’industrie nucléaire n’a nullement anticipé toutes les connaissances et toutes les compétences dont elle a besoin pour mener à bien son développement ; curieuse situation pour un secteur d’activités au sein duquel la Recherche et Développement joue un rôle majeur. C’est pourquoi la prospection de compétences constitue, désormais, un enjeu stratégique car la pénurie menace. Faute de ne pas avoir anticipé l’ampleur du développement de l’industrie nucléaire, nombre de projets vont manquer cruellement de ressources qualifiées. C’est un sujet crucial dit on chez Areva. La situation est critique à l’EDF. Suez qui gère 7 centrales nucléaires doit embaucher d’urgence 700 ingénieurs et techniciens. Le directeur des études RH d’Aréva, qui doit trouver, pour 2008, 1000 ingénieurs et cadres, M Jean Cassingéna, explique que tous les acteurs du secteur sont confrontés au même phénomène et qu’il faut rapidement repenser les capacités de production, les dispositifs de recrutement et de formation. Mais dans un contexte démographique défavorable, avec une concurrence des établissements financiers et des SSII et une faible quantité d’ingénieurs formés chaque année en France (15000 contre 400000 en INDE), la situation devient très tendue. Des chantiers d’évaluation des compétences internes aux entreprises, associés à une analyse fine des besoins, devraient être mis en place et des cursus de formation pourraient réduire l’écart entre les besoins et les ressources.
    D’autre part, les séniors devraient voir leur carrière s’allonger. Ils devront aussi capitaliser leur savoir faire et en assurer la transmission. Enfin les entreprises vont se rapprocher des écoles d’ingénieurs pour les aider à recruter plus de candidats. Tous les acteurs publics ou privés de la formation doivent répondre présent et le cas échéant mutualiser leurs pratiques (évaluation des compétences, spécialisation des disciplines, productions d’outils pédagogiques, recherche d’expertise avec formalisation et transmission…).
    Il serait en effet dommageable, pour notre pays, que le savoir faire acquis dans ce domaine depuis 60 ans disparût.
    Si j’ai choisi cet exemple, c’est qu’il illustre bien tous les dangers d’une rupture de la chaine de production et de transmission du savoir opérationnel dans des secteurs où les projets se gèrent sur 30 ou 40 ans avec des temps de renouvellement longs et incertains, impactés par des évolutions technologiques.
    La gestion du savoir opérationnel et des compétences induites ne peut plus être aujourd’hui dissociée de la stratégie des entreprises.
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