L’économie de la connaissance et l’encyclopédie
J’ai déjà fait part, dans mes communications précédentes, de mon enthousiasme sur le développement inouï des connaissances, tant dans ses formes que dans ses contenus.
Le web, et ses capacités extraordinaires de stockage, de classement, de partage du savoir, entretient cet enthousiasme. Le caractère opérationnel de ce savoir, la création de valeur qu’il génère, s’imposent chaque jour à notre observation.
Cependant j’aimerais, sans pour autant tempérer mon optimisme, rappeler que l’importance décisive de la connaissance pour le développement économique ne date pas d’hier. En effet, ce processus moteur a commencé il y a 250 ans avec la publication de l’Encyclopédie, premier dictionnaire du savoir opérationnel. Et les parallèles avec les problématiques de notre Knowledge Management d’aujourd’hui sont frappants. La célèbre Encyclopédie de Diderot et D’Alembert organisait les connaissances selon les usages que l’homme pouvait en faire et rattachait ces derniers aux facultés mentales et cognitives. Trois grandes facultés émergeaient alors :
- La mémoire ou la capacité de se souvenir des usages et des pratiques
- La raison ou la capacité de relier et de conceptualiser
- L’imaginaire ou la capacité de créer, notamment au travers de l’expression artistique
Cette conception fut, pour l’époque, révolutionnaire. La publication de l’Encyclopédie fit l’objet d’un combat âpre et prolongé. La première des adversités fut celle des jésuites qui virent dans cette démarche novatrice une remise en question de leur ordonnancement des savoirs et de leur méthode pédagogique. Mais l’autorité politique ne demeura pas en reste puisqu’elle s’opposa à tout ce qui dans le « mouvement encyclopédique » put contester le caractère absolu et intangible du pouvoir.
On sait ce qu’il advint de cette lutte entre autorité traditionnelle et philosophie des lumières.
La connaissance s’émancipa de sa tutelle divine et vint nourrir les relations entre les hommes et leur environnement. Sous l’influence de Diderot et de D’Alembert le savoir transforma, d’une part, l’organisation sociale, ouvrant la voie de la Révolution Française, d’autre part, l’organisation économique qui conduisit à la Révolution industrielle.
La novation de la démarche encyclopédique peut, de ce point de vue, apparaître comme une des premières formes du savoir opérationnel. Pour clore, provisoirement, cette réflexion, quelques remarques issues de la recherche scientifique la plus contemporaine ; remarques qui font le lien entre l’idée du savoir et celle d’opération.
L’homme est au cœur de l’univers et l’univers au cœur de l’homme. Selon le principe hologrammatique de la Pensée de la Complexité, la partie est dans le tout mais le tout est dans la partie. Cet apparent paradoxe, relevé par l’astrophysique, montre l’interdépendance de tous les éléments de la réalité de l’univers, et ce quelles que soient leurs dimensions.
Si l’on ajoute, comme l’affirment nombre de spécialistes de l’activité cérébrale, que notre cerveau contient 100 milliards de cellules nerveuses échangeant entre elles 1 million de milliards de liaisons ou synapses, on peut, alors, en forçant le trait, considérer le monde comme une gigantesque combinatoire et le savoir comme une opération infiniment renouvelée.